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Des approches innovantes dans la mobilisation des diasporas : i-platform/i-dijaspora connectant la diaspora bosniaque et herzégovine en Suisse

Larisa LARA-GUERRERO
12 juillet 2021

Des approches innovantes dans la mobilisation des diasporas : i-platform/i-dijaspora connectant la diaspora bosniaque et herzégovine en Suisse

Aida Ibričević

Légende de l'image principale : En 2018, i-platform a organisé la série d'événements (H)AJMO! à Berne et à Zurich, en Suisse. Source : i-dijaspora/i-platform.

Le "i" connecteur

«La conjonction bosniaque/croate/serbe "i" (qui signifie "et" en français) dans notre nom signifie connexion, inclusion, unité. Le "i/et" de notre nom désigne notre diaspora et" notre Bosnie-Herzégovine (BiH), notre présence ici "et" notre présence là-bas''. Avec cette approche, nous établissons un lien entre les questions relatives à l'économie "et" la culture, l'égalité des sexes "et" la collaboration scientifique, la conservation de l'environnement "et" la représentation politique. Nous nous opposons tout simplement à toutes formes de divisions, et nous voulons au contraire créer des réseaux. Nous voulons connecter les gens», répond Nikola Burić, PDG de i-platform/i-dijaspora, lorsqu'on l'interroge sur le "i/et" de leur nom. Nikola explique ensuite : «Nous sommes avant tout un réseau, reposant sur des principes de tissage de réseaux, où le développement de liens humains forts et la promotion de la confiance sont une priorité.»

La diaspora Bosniaque et Herzégovine en Suisse

Selon l'étude de 2014 réalisée par le Forum Suisse pour l'étude des Migrations et de la Population (SFM) de l'Université de Neuchâtel, plus de 60 000 émigrants originaires de BiH vivent et travaillent en Suisse. Ces personnes sont arrivées en Suisse en provenance de BiH en trois vagues d'immigration distinctes où la première et la deuxième vague (années 1960 et 1980) étaient principalement des travailleurs migrants, tandis que la troisième vague de réfugiés, la plus importante, a été causée par la guerre de 1992-1995 en Bosnie-Herzégovine. Nikola Burić évoque le rôle de l'i-diaspora/i-plateforme dans la vie de la diaspora de Bosnie-Herzégovine en Suisse : « L'organisation i-diaspora a été fondée en 2014 et est de type semi-ouvert car il existe différentes manières de devenir membre. Après deux ans de succès et d'innombrables réunions bilatérales et multilatérales avec diverses institutions, il nous est apparu que nous avions besoin d'une plateforme plus grande, d'un réseau avec davantage de membres. En 2016, nous avons lancé un projet d’adhésion massive pour les particuliers, les institutions, les ONG et les entreprises. » Par ailleurs, le réseau i-dijaspora/i-platform s'est associé à l’Agence du Développement et de la Coopération Suisse (DDC) pour créer une plateforme autonome dont l'objectif principal est de renforcer la coopération économique, éducative, culturelle et sociale entre la Bosnie-Herzégovine et la diaspora de BiH en Suisse.

La crise du COVID-19, une opportunité : Connecter la diaspora de Bosnie-Herzégovine en ligne

La connexion transfrontalière accrue due à la crise du COVID-19 a été perçue comme une réelle opportunité par les membres de i-dijaspora/i-platform. Dès les premiers confinements, ils ont commencé à concevoir des approches innovantes pour connecter la diaspora de BiH en Suisse à leur pays d’origine, ainsi que la diaspora de BiH à travers le monde. Comme l'explique Nikola Burić «Avant la crise du COVID-19, nous avons organisé de nombreux forums d'affaires en présentiel, des événements culturels, des écoles d'été, des échanges d’étudiants, nous avions des événements où les gens pouvaient se rencontrer et partager leurs expériences. Nous pouvions ensuite soutenir davantage les initiatives et les idées ayant émergées lors de ces interactions. Paradoxalement, alors que nous étions tous coincés chez nous, tant en Suisse qu'en Bosnie-Herzégovine, une superbe opportunité s'est présentée : celle de nous connecter en ligne avec notre diaspora dispersée dans le monde entier». Grâce aux merveilles des TIC (Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication), des échanges et des rencontres avec la diaspora pour les communautés locales de Bosnie-Herzégovine et une série d'événements thématiques en ligne ont été créés.

Courtesy of i-dijaspora/i-platform


Avec la permission d'i-dijaspora/i-platform.

Des dialogues entre diasporas : Départ, arrivée et appartenance

Les discussions entre diasporas permettent de créer une communauté à l'aide d'un "format d’échange" mis au point par Katalin Hausel, artiste, designer et éducatrice helvético-hongroise, en coopération avec Collaboratio Helvetica. Les échanges portent sur les expériences vécues lors du départ du pays d'origine, de l'arrivée en Suisse et de la création d'un sentiment d'appartenance dans les deux pays. Le format du dialogue repose sur des questions introspectives, telles que : « Qui suis-je ? », « Qu'est-ce que je désire ? », « À quoi j'appartiens ? », « Comment suis-je devenu ce que je suis aujourd'hui ? », « Où est-ce que je me sens chez moi ? », « Qu'est-ce que la maison ? », « L'appartenance, quel genre de sentiment est-ce ? », « Où est-ce que je la ressens dans mon corps ? ». Les participants au dialogue donnent des réponses individuelles à ces questions posées en binôme, puis partagent leurs observations avec le reste du groupe. Les principes de base du dialogue sont de parler avec intention et d'écouter avec attention ; de remplacer les recommandations par la curiosité intellectuelle ; et de créer un environnement sûr et stimulant où tous les participants se sentent en confiance pour révéler leur sensibilité.

Des rencontres pour les communautés locales

Au lieu de considérer la diaspora comme un ensemble monolithique et relativement abstrait, une approche translocale suggère l'existence de nombreuses diasporas diverses, axées sur l'appartenance à de petites communautés locales. Reconnaissant la réalité de nombreuses diasporas différentes, i-dijaspora/i-platform a lancé des rencontres sur Internet pour la diaspora mondiale des villes de Bosnie-Herzégovine : Zenica, Živinice, Bijeljina et Kladanj. En discutant avec Dalida Karabdić, la représentante d'i-dijaspora/i-platform à Kladanj, nous apprenons que le modèle d'engagement de la communauté locale de Kladanj a fait ses preuves. « Depuis octobre de l'année dernière jusqu'à aujourd'hui, nous avons organisé neuf rencontres en ligne avec pour idée principale de rétablir la confiance mutuelle avec la diaspora de Kladanj. En tant que petite communauté locale d’environ 13 000 habitants, nous avons une occasion formidable de se rapprocher de notre diaspora, de constituer une véritable équipe. Nous voulons travailler ensemble, les familles de Kladanj et celles de l'étranger, les individus, les institutions éducatives, culturelles et sportives ainsi que la municipalité de Kladanj, avec laquelle un Accord de Collaboration a été signé. Comme nous sommes une communauté très unie, nous nous connaissons bien pour la plupart, mais il arrive souvent que certains membres d'une même famille vivent à Kladanj tandis que d'autres peuvent se trouver aux États-Unis, en Suède, en Italie, en France ou en Allemagne. Ce type d'engagement de la diaspora est personnel, intime et, surtout, basé sur la confiance », a déclaré Karabdić.

Des rencontres en ligne entre membres de la diaspora, des soirées littéraires et des événements à thème

Afin de mettre à profit les opportunités d'engagement très spécifique de la diaspora, i-dijaspora/i-platform a organisé des discussions en ligne sur des sujets variés tels que le bilinguisme, la préservation de l'environnement, ainsi que des soirées littéraires et une conférence sur la démocratie délibérative. «Nous sommes un réseau et nous essayons d'encourager les gens à offrir leurs connaissances et leurs expériences, afin que nous puissions tous en bénéficier. Notre communauté de ressources est impressionnante et notre approche est basée sur l'auto-organisation et l'autogestion, car si nous n'agissons pas, qui le fera ? Si ce n'est pas maintenant, alors quand?». Les mots de conclusion de Nikola Burić soulignent à la fois l'urgence de l'engagement des diasporas et les opportunités extraordinaires offertes par la numérisation accrue de cette coopération.

Aida Ibričević

Dr Ibričević est une chercheuse indépendante spécialisée dans les études sur les migrations et les diasporas basée à Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine, affiliée en tant que membre international au Centre des migrations de l'Institut de recherche sur la paix d'Oslo (PRIO) en Norvège, et chargée de recherche au Centre d'études sur les diasporas de l'École des sciences et des technologies de Sarajevo. Ses recherches les plus récentes portent sur le retour et la réintégration, le lien entre la citoyenneté, le foyer et l'appartenance, le vote externe et la fuite des cerveaux. Aida a fourni des services de conseil à diverses agences de développement international notamment l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). Elle fournit également des services de révision pour un certain nombre de revues universitaires internationales évaluées par des pairs. Elle est titulaire d'une licence et d'une maîtrise en économie du Middlebury College aux États-Unis et de l'Université d'Europe centrale, en Hongrie. Elle est titulaire d'un doctorat en sciences politiques de l'université Bilgi d'Istanbul, en Turquie. Pour en savoir plus: https://www.linkedin.com/in/aidaibricevic/ et https://www.researchgate.net/profile/Aida-Ibricevic.

Cet article fait partie du numéro "Renforcer les Capacités des Diasporas Mondiales dans l'Ère Numérique", une collaboration entre Routed Magazine et iDiaspora. Les opinions exprimées dans cette publication sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) ou de Routed Magazine.

Nous reconnaissons également l'importante contributions importantes de l'équipe de promotion et de communication : Achille Versaevel, Fiona Buchanan, Lena Hartz, Malin Evertsz Mendez, Margaret Koudelkova et Shaddin Almasri. Enfin, nous tenons à remercier le travail de traduction en français réalisé par Catherine Meunier, Elisabeth Loua, François Lesegretain, Anaïs Fournier, Aurianne Ortais et Chloé Bianéis.